Plusieurs sources d’information ont rapporté de l’anosmie comme symptôme inaugural chez des patients suspects ou confirmés Covid-19 un peu partout à travers le monde (1-3). Face à la multiplication des déclarations médicales dans la presse, un groupe de spécialistes ORL de l’IFOS (fédération internationale des sociétés d’ORL) a développé un questionnaire permettant d’investiguer ces troubles de l’odorat et du goût chez des patients infectés par le Covid-19 (infection prouvée par un test PCR). Que révèle cette étude coordonnée par les Pr Jérôme Lechien et Sven Saussez, ORL et chercheurs à l’Université de Mons (4)?
Réalisée à travers 12 hôpitaux européens auprès de 417 patients (263 femmes et 154 hommes) présentant une forme non sévère d’infection à Covid-19 (prouvée par un test PCR), l’étude a d’abord montré que les symptômes généraux les plus fréquents de la maladie sont la toux, les douleurs musculaires, la perte d’appétit et la fièvre, tandis que les symptômes ORL les plus fréquents sont les douleurs faciales et l’obstruction nasale. La perte de l’odorat (parfois totale), constatée chez 86% des patients, se ferait de manière brutale sans obstruction nasale et serait souvent accompagnée d’un trouble du goût (88% des cas), avec parfois disparition totale.
Une perte d’odorat parfois totale
Généralement observée chez de jeunes patients ayant des formes «peu sévères» de la maladie liée au Covid-19, la perte de l’odorat pourrait aussi survenir de façon isolée sans inflammation et sans être associée aux symptômes de fièvre et toux. Les troubles de l’odorat surviennent avant l’apparition des symptômes généraux et ORL dans 12% des cas, pendant dans 65% des cas et après dans 23% des cas. Dans 20% des cas, l’anosmie n’est pas associée à des symptômes ORL. Dans l’étude publiée, les femmes sont nettement et statistiquement plus atteintes par cette anosmie (92% d’anosmie chez les femmes contre 82% chez les hommes).
Récupération et mécanismes d’action
44% des patients ont récupéré leur odorat dans un délai court (15 jours). On peut cependant espérer pour les autres patients un bon espoir de récupération dans les 12 mois après l’apparition des symptômes si l’on en croit ce qui a été observé dans le cadre d’autres maladies virales. La récupération du goût est aléatoire, peut se faire avant, en même temps ou après la récupération de l’odorat. Quant aux mécanismes de cette neuropathie olfactive, ils ne sont pas encore connus.
Les auteurs de l’étude formulent 3 recommandations en conclusion:
1. Une anosmie et/ou une dysgueusie survenue au cours des dernières semaines (après le 1er mars 2020) chez des patients ne présentant aucun antécédent ORL (sinusite chronique, polypes nasaux, chirurgie nasale ou sinusale) doit être considérée comme un symptôme spécifique de l’infection à Covid-19 et devrait être officiellement ajoutée à la liste des autres symptômes repris par l’OMS.
2. Se basant sur le principe de précaution, les patients atteints d’une anosmie/dysgueusie isolée (sans autres symptômes de la maladie) devraient être considérés comme potentiellement infectés par le Covid-19 et donc isolés pour une période minimale de 7 jours (à discuter avec le médecin traitant).
3. Les traitements habituellement donnés pour traiter l’anosmie, à savoir les corticoïdes oraux ou nasaux (spray) et les lavages nasaux, sont contre-indiqués dans le cadre de ces anosmies en relation avec l’infection à Covid-19.
Les auteurs vont poursuivre cette étude chez les patients anosmiques Covid-19 positifs afin notamment de tenter d’expliquer les mécanismes de cette anosmie, tandis qu’une nouvelle étude est lancée chez ces patients afin de démontrer qu’ils sont bien (ou pas) porteurs du virus.
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Marie GONZE
27 avril 2020comment peut-on participer à l'étude ?
Marie GONZE
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